Nouakchott, capitale de la Mauritanie, autrefois chargée d’histoire et symbole de la nation naissante, est en train de perdre son âme au fil des destructions successives de ses bâtiments emblématiques. La plus vieille avenue de la ville, l’avenue de l’indépendance, qui a vu naître les institutions du pays, est aujourd’hui victime d’une modernisation qui semble effacer la mémoire de la ville.
Les symboles de l’histoire mauritanienne disparaissent l’un après l’autre. L’immeuble de l’Assemblée nationale (ancien Sénat), où fut proclamée la nationalisation de la MIFERMA, a été rasé. L’École 8, monument historique qui abrita la première Assemblée constituante, a subi le même sort. Le Ministère des Affaires étrangères, la place de l’OIT, l’hôtel des députés et bien d’autres édifices emblématiques ont été sacrifiés sur l’autel de la modernité.
Cette transformation, souvent réalisée au mépris des spécificités climatiques et culturelles du pays, pose de sérieuses questions sur l’identité de la capitale et son avenir. Le recours à des matériaux modernes comme l’aluminium, bien que vanté pour sa durabilité, n’est pas adapté aux conditions climatiques extrêmes du désert saharien. Les bâtiments en aluminium, sensibles aux variations de température, manquent de l’isolation thermique nécessaire pour résister aux chaleurs accablantes de la région, rendant les intérieurs inconfortables et augmentant la dépendance à la climatisation.
En revanche, les constructions traditionnelles mauritaniennes, faites de briques d’adobe, de terre crue et de pierres locales, offraient une meilleure isolation thermique et étaient parfaitement adaptées au climat saharien. Ces bâtiments, au-delà de leur efficacité environnementale, incarnaient aussi un savoir-faire ancestral, une architecture pensée en symbiose avec la culture et les besoins sociaux des populations locales. Les petites fenêtres, les cours intérieures et l’usage de matériaux locaux favorisaient la circulation de l’air et protégeaient les habitants des températures extrêmes.
Face à cette modernisation effrénée, il est légitime de s’interroger sur l’avenir de Nouakchott. La ville, sous l’assaut des bâtiments en béton et aluminium, risque de se retrouver dépouillée de son identité, réduite à une métropole sans mémoire et sans âme. Chaque destruction d’un monument historique est un pas de plus vers la dissolution d’une histoire collective, un effacement progressif de la culture et du patrimoine de la capitale.
Il est crucial que les autorités publiques, les urbanistes et les architectes se mobilisent pour préserver ce qui reste des édifices anciens de Nouakchott. Plutôt que de céder à la pression de la modernité, il serait possible d’adopter une approche plus respectueuse du patrimoine, en intégrant des éléments modernes aux structures traditionnelles. Cette démarche permettrait de trouver un équilibre entre innovation et préservation, garantissant que la ville évolue tout en conservant ses racines.
Des initiatives de restauration et de mise en valeur des bâtiments historiques pourraient être mises en place pour sensibiliser les populations à l’importance de ces lieux. Par ailleurs, la promotion de l’architecture vernaculaire, qui répond à la fois aux exigences climatiques et culturelles, pourrait être encouragée. Cela contribuerait non seulement à préserver l’âme de la capitale, mais aussi à promouvoir un modèle de développement durable, ancré dans l’histoire et la réalité locale.
En somme, Nouakchott doit trouver un juste milieu entre modernisation et préservation de son patrimoine. Il en va de l’identité même de la ville, de la mémoire collective de ses habitants, et de l’image qu’elle projette aux générations futures. Si la modernité peut apporter des améliorations techniques, elle ne doit pas pour autant effacer l’histoire et la culture d’une capitale qui, au fil des années, pourrait bien perdre son âme
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