Le Président français au Maroc : encore et toujours, ‘’mon’’ Macron fascinant !

J’ai suivi avec intérêt le discours prononcé hier par le Président français devant le parlement marocain. J’ai eu toujours une fascination particulière pour sa verve et son éloquence, et pour ses délicates tentatives d’équilibriste géopolitique. Cette fois-ci, je l’ai réécouté plusieurs fois en m’amusant à jouer au ‘’statisticien’’ et au ‘’géopolitologue’’.

Statistiques

Pendant 42 mn, 5322 mots sont sortis de la bouche d’Emmanuel Macron devant les parlementaires du royaume chérifien. Le mot ‘’France’’ et le mot ‘’Je’’ ou ses équivalents- (moi, me) - y ont compté dans des proportions variables : le premier fut prononcé 40 fois par le Président français et le second 66 fois ; ce qui équivaut en termes de pourcentage à :

  0,71% pour « France » et 1,24% pour ‘’Je’’.

 Ce dernier, c’est-à-dire dire le Président, faisant plus d'une fois et demi le pays.

Que doit-on en conclure ?

 S’agirait-il d’une surestimation de soi ? Si oui, est-ce vraiment un défaut dans la mesure où tout leader politique a quelque part sa propre dose ‘’d’égo surdimensionné’’ ?

 L’occupant de l’Elysée ne devait pas faire exception. Au contraire, il semble avoir des atouts sur ce champ, comparativement à ses adversaires et collègues. Et il manque rarement l’occasion de les mettre en œuvre, notamment quand il s’adresse aux Africains au point de friser parfois les limites de l’arrogance et la mégalomanie. Son discours, hier, est certainement l'un des plus marquants en termes de faire valoir son image personnelle.

Géopolitique

La clarté d’Emmanuel Macron est vraiment saisissante quant à sa position sur la question du Sahara occidental :

‘’ (…) je le réaffirme ici devant vous : pour la France, le présent et l’avenir de ce territoire s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine,’’ a-t-il déclaré sur un ton solennel, suscitant la plus grande et longue salve d’applaudissements faite par l’auditoire, durant son intervention.

Il ajouta cependant, en direction de l’Algérie sans toutefois identifier le destinataire de son message : ‘’Cette position n’est hostile à personne’’, se livrant ainsi à un semblant de jeu d’équilibrisme diplomatique qui ne trompe personne.

L’Algérie ne manquera pas de le lui faire savoir. Et à sa manière !

D’autres points clivants dans la démarche du Président français ont retenu mon attention, notamment à propos de l’insécurité au sahel et de la guerre israélienne en Palestine et au Liban.

En parlant, selon ses propres mots,  de ‘ce qui s'est passé en Libye, de ses conséquences au Sahel et au Maghreb’’, Macron a dit que ‘’ pendant une décennie, elle- (la France, NDLR) - a évité l'effondrement de plusieurs États face au terrorisme’’.

Et d’ajouter : ‘’ j'ai une mémoire émue pour les enfants que notre pays a donnés pour la stabilité du Sahel, au Mali et ailleurs.’’

Son émotion est certainement sincère. Sauf que parmi la délégation qui l’accompagne dans sa visite au Maroc figure un homme qui a joué un rôle très important dans le développement de la grave crise sécuritaire en Libye et au Sahel. Une crise ayant conduit à la mort des dizaines de militaires français dont Macron salue présentement la mémoire.

 L’homme dont il est question n’est autre que l'un de ses soutiens politico-intellectuels celèbres : le soi-disant philosphe BHL (Bernard Henry Lévy). Instigateur de guerre et d’insécurité au Sahel, malgré sa sournoiserie, cet homme, avait du mal à cacher ses motivations réelles. Il a affirmé qu’en oeuvrant pour l’élimination de Kadafi et son régime, il avait un objectif : servir Israël et le sionisme.

Un objectif qu’il continue d’assumer. Il s’y attache même davantage aujourd’hui en soutenant totalement Israël dans ses guerres et opérations criminelles en cours au Moyen-Orient, notamment contre les Palestiniens et les Libanais.

Par contre, le Président français rappela devant le parlement marocain qu’il appelle à un cessez-le feu depuis novembre dernier ; c’est-à-dire un mois à peine après le déclenchement du génocide palestinien de Gaza. Et depuis début octobre dernier, il a suggéré de suspendre la livraison des armes aux belligérants, y compris Israël. Une suggestion qu’il a réitérée hier devant les élus marocains.

Sur ce point, il est certain qu’il ne doit pas être en accord avec BHL, son compagnon de voyage.

Mais peu importe :  comme il l’a déjà fait en octobre dernier, l’Elysée pourrait toujours se rétracter en réaffirmant que la France continuera à aider Israël à se défendre en lui fournissant armes et soutiens militaires. L’équilibre des contradictions dans la politique étrangère française est ainsi assuré : le Président de la République fait une annonce, son cabinet dit le contraire et le système marche.

C’est fascinant, n’est-ce pas, cette cohérence dans l’incohérence ''made in'' Macron ?

 

El Boukhary Mohamed Mouemel

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