Le retrait français du Mali et la mauvaise question

Pour beaucoup d’observateurs, notamment en Afrique, le retrait militaire français du Mali constitue une défaite militaire humiliante pour Paris. Pour d’autres, l’échec est plutôt politique.  Poser le problème sous cet angle, en termes de dualité- politique ou militaire?- c’est passer à côté des bonnes questions. Car cela équivaut à dissocier le concept de la guerre de son objectif et à l’opposer à celui de politique.  

Or, le critère du succès dans un conflit armé consiste, selon Clausewitz, à vaincre la volonté de l’ennemi :

« La guerre est un acte de violence dont l'objectif est de contraindre l'adversaire à exécuter notre volonté », écrivait-il.

Il s’agit, en effet, d’atteindre un objectif purement politique que le polémologue allemand définit clairement en affirmant que « « La guerre n'est qu'un prolongement de la politique par d'autres moyens ».  En renversant la thèse de Clausewitz, le philosophe français, Michel Foucault, ne dit pas autre chose quand il réplique : « c’est la politique qui est la continuation de la guerre par d'autres moyens. »

Par rapport à cela, quels sont les résultats de la France dans sa guerre contre les « djihadistes » au Mali ?  

 Les a-t-elle contraints à exécuter sa volonté ?

A l’Elysée, et dans le ministère des armées et Etats-majors français, on élude la question, les dirigeants politiques et militaires préférant plutôt mettre en avant le bilan chiffré des pertes ennemies.

Sauf que dans un conflit d’une telle complexité, la victoire ne se mesure pas seulement au nombre de morts, ni à l’ampleur de dégâts matériels, infligés à l’adversaire. Si tels étaient les bons indicateurs d’évaluation, des puissances occidentales, comme les Etats-Unis, la France et le Portugal, auraient été victorieuses dans les guerres qu’elles ont menées, respectivement, en Afghanistan et au Viêt-Nam, en Algérie, et dans les anciennes colonies portugaises en Afrique. Leurs adversaires voulaient leur départ et l’indépendance de leurs pays, et ils ont obtenu ce pour quoi ils se battaient.

De même, les "djihadistes" exigeaient le départ des forces étrangères en ciblant les forces françaises. Ce retrait est désormais officiel depuis cinq ou six jours en ce qui concerne ces dernières et certainement le contingent européen,Task Force (Takuba), aussi.

Qu’en sera-t-il des autres forces étrangères, onusiennes (MINUSMA), européennes (EUTM) et africaines (Force commune du G5 Sahe)… ?

L’échec militaire français au Mali aura certainement des incidences sur ces dispositifs militaires et sécuritaires. En plus, outre l’humiliation subie par la France, ses échos dans la région et dans le monde, seront certainement, vécus positivement du côté des terroristes. Ce qui aidera indirectement à atténuer les effets dramatiques de la guerre armée interne que ces groupes se livrent. Une guerre fratricide qui oppose le JNIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans) à l’EIGS (Etat islamique dans le grand Sahara) .  

El Boukhary Mohamed Mouemel

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