Le dimanche, 19 juillet 2020, le colonel Niang Abdoul Aziz nous a quittés sans pouvoir nous dire au revoir, nous laissant dans une consternation et une grande tristesse par la soudaineté de sa disparition. Il est arraché à notre affection au moment où personne ne s’y attendait. C’est la volonté de Dieu auprès duquel nous formulons nos prières pour le repos de son âme, en paix, au paradis. Amine !
Le colonel Niang est né, en 1952, à Guidakhar où il a débuté ses études primaires avant de continuer au village de Keur Mour puis au Collège et Lycée national de Nouakchott. Très consciencieux de l’âge avancé de ses parents et de la faiblesse de leurs ressources, il arrêta ses études pour s’orienter vers le marché de l’emploi par la préparation à des concours, il en passe deux et les réussit : infirmier d’Etat et celui du recrutement d’élèves officiers de l’Armée de terre. Sans hésiter, il choit d’endosser la tenue de la grande muette qui lui permettra de suivre une formation à l’école spéciale militaire de Saint-Cyr Coëtquidan à Guer, Morbihan en Bretagne (France). A son retour au pays, il devient instructeur à l’école militaire interarmées d’Atar (EMIA), il enchainera d’autres formations de perfectionnement en Algérie, en France à la célèbre Ecole de Guerre, de formation des officiers supérieurs des forces armées françaises et des services de défense (Paris), et un stage en Chine.
Il parvient à se hisser au sommet de la hiérarchie militaire comme officier supérieur par son intelligence, son professionnalisme, le sens élevé du devoir et son attachement aux principes et règles qui régissent la discipline militaire. Militaire dans l’âme, le colonel Aziz occupera de hautes fonctions, entre autres, en qualité de chef du 4ème bureau, Directeur du Matériel à l’Etat-major de l’Armée, Conseiller du chef d’Etat-major, chef du cabinet militaire du Président de la République, puis attaché militaire à l’Ambassade de Mauritanie à Alger. En même temps, il cumule les fonctions de point focal de l’OTAN pour la Mauritanie. Le Colonel Aziz s’est toujours distingué par sa rigueur, son grand patriotisme, son amour pour le travail et sa passion pour l’Armée. C’est la raison pour laquelle, dès l’engagement de la Mauritanie dans la guerre du Sahara Occidental en 1975, il faisait partie des premiers officiers à fouler le terrain de la conflictualité, avec dévouement et bravoure en prenant d’énormes risques face à l’ennemi pour défendre vigoureusement sa patrie.
C’est d’ailleurs pendant l’une de ces opérations au Sahara occidental, notamment sur la partie qui avait été récupérée par la Mauritanie qu’il a eu un accident en marchant sur une mine posée par l’ennemi. Secouru par son cousin, Ndiack Ndiaye, un autre brave officier de l’armée de l’air, il s’en sort avec une grave blessure au pied. Malgré cette contrainte, il continue de travailler pour cette armée et contribue grandement à sa modernisation et sa bonne gouvernance. Nul doute que le colonel Niang Abdoul Aziz a montré son courage, sa disponibilité et son expertise à chaque fois que la sécurité est en jeu, notamment pendant des périodes d’incertitudes.
Même à la retraite, il présidera, avec honneur et générosité, l’Association Mauritanienne des Retraités et Anciens Militaires (AMRAN) jusqu’au jour où Dieu décida de nous priver de sa présence parmi nous. Sur le plan humain, le colonel Niang avait une grande capacité d’écoute, généreux, il aidait tout le monde, des membres de sa famille, des proches et d’autres connaissances qui venaient lui exposer leurs difficultés face à l’adversité. Il éprouvait une affection et un attachement légendaires pour son village, Guidakhar, où il venait passer une bonne partie de son temps, en discutant courtoisement avec les familles. Il n’aménageait aucun effort pour leur venir en aide, apaiser les souffrances et intervenir si nécessaire pour garantir la paix sociale et la sérénité. On constate son attachement à la religion par des gestes symboliques (bonté et religiosité) et pratiques sans failles, mais surtout les efforts personnels qu’il déployait pour une meilleure organisation des Gamou (chants religieux, avec une dimension sociale et économique). Dans cette perspective, il mettait sa maison à Rosso à la disposition de Guidakhar pour l’accueil des invités et des animateurs des soirées religieuses. Pour mieux se mettre à la disposition de son village, il était élu conseiller municipal avant de céder sa place aux plus jeunes et se consacrer à des rencontres entre cadres de la wilaya du Trarza parmi lesquels il comptait beaucoup d’amis et de sympathisants.
En définitive, la disparition du colonel Aziz est une grande perte pour la Mauritanie, son Armée, sa famille, le village de Guidakhar et les walo walo de façon générale. Colonel Repose en paix, tes héritiers, tes proches et ton village continueront le travail que tu n’as pas pu achever sur ta terre natale, et les lieux dits que tu affectionnais tant, comme Kreyat, Ndiandou ou Tassaya. Colonel que la terre te soit légère, Amine !
Par Moussa DIAW,
professeur de science politique
à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis.
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