Dans un brouillard de littérature : talent et mérite...

Nous suivons depuis un certain temps, sur cet espace virtuel et ailleurs, une petite dialectique autour de l'entrée, en temple de la littérature mauritanienne d'expression française, de telle ou telle de nos plûmes nationales. Des plûmes qui sont toutes éligibles à cette enseigne, ne serait-que du fait de s'être exprimées en écrit, dans un pays où la consignation des émotions et de l'imaginaire n'était pas toujours de mise dans la pratique collective.

Ce débat saccadé, s'ouvrant et se refermant, en dit beaucoup sur la délicatesse du sujet, sa sensibilité pour ceux qui se sentent exclus et leurs soutiens, mais aussi sur la gêne qu'il occasionne pour ceux qui n'osent prendre parti, par prudence, ou par ignorance des méandres de cette sphère du livre en français, se disant que sommes toutes, les voies du français ont toujours été impénétrables et sources de conflits...

De mon point de vue, ce débat rappelle ce qu'on pouvait lire sur Le Salon des Refusés dans la France de la fin du 19 siècle, quand les peintres Monet et Manet, qui deviendront des sommités jusqu'à nos jours, se voyaient refouler et huer par leurs pairs, leur refusant le label de peintres reconnu par la république. Toutefois, ces jeux de critères et d'admission, ne nous y méprenons pas, peuvent aussi être perçus comme des signes de bonnes santé culturelle à bien y regarder (dans l'histoire).

Avant de me jeter la première pierre, sachez que je ne veux pas dire ici que l'Anthologie mauritanienne a eu raison d'exclure des auteurs, mais je tente en fait de voir les choses sous des angles différents, les aléas d'honorabilité de toute œuvre humaine tenant à tout et à rien à la fois....
J'ai reçu et lu l'Anthologie, je vous livre mon sentiment, en tant que passionnée de littérature, mais aussi praticienne des textes, dans une certaine vie. S'il m'est permis de m'exprimer librement, je dirais qu'elle est de bonne facture, qu'elle vient en réponse à un vide, malgré son coté compilation sélective et sa présentation restrictive. Et en cela, je crois qu'elle mérite qu'on s'en réjouisse, sous nos latitudes où ce ne sont pas les processus aboutis qui pullulent. Qu'on s'en réjouisse au-delà de la figuration de tel ou tel paraphe, une fois que l'on se soit interrogé, je crois ensuite qu'il faille faire appel à la positivité. Si le combat premier des amoureux des Lettres mauritaniennes est de faire connaitre cet art du verbe en pays nomade, et bien la chose est assez acquise, en termes de représentativité. Si cependant le combat est entre autres, un nom en haut de l'affiche comme chantait Aznavour, ce genre de bataille est souvent de longue haleine et les embûches sont toujours à prévoir. Ce sont  des trajectoires personnelles, à elles de ne pas baisser les bras, pas en termes d'aigreur mais en terme de persévérance... Vous savez, la qualité est comme la vérité...elle ne passe jamais la nuit dehors, si vous méritez honneurs, les honneurs viendont, un jour ou l'autre, à l'intérieur, ou à l'étranger...A vous de tout dégainer...en termes de talent…  S'il est là, bien assis, il finira par s'imposer. Et c'est souvent la vraie victoire, celle du mérite.
Par ailleurs pour revenir à la source, à se poser la question : De quoi la Littérature est-elle le nom? D'emblée on dira que c'est un art, et aussi une manière de créer. Une perspective. Des personnages construits. Des techniques de narration, de création. De la fluidité. Du vrai. Du vraisemblable et de l'imaginaire à la fois. De la force aussi.

Pour ma part, très sincèrement, je ne crois pas que toutes ces caractéristiques soient bien incrustées dans les flux littéraires de nos chers écrivains et poètes...Parfois, on est un peu sur notre faim quand ce n'est pas le contraire, nous gaver de surcharge de sens, de personnages trop montés, de tournures langagières précieuses, .... Mais bon ! Quelque chose y est quand même et on veut rester là-dessus, on veut l'encourager, le promouvoir, lui dire vas, tu y arriveras...Et parfois, cela arrive, avec bel éclat, comme on la vu récemment, sous le ciel genevois.
Figurer ou pas dans l'Anthologie ne propulse pas une flèche de lecture, ni n'amoindrit une main bien partie dans l'écriture. On n'a jamais vu quelqu'un lire un auteur car il fait partie de...De tout temps les artistes ont forcé les verrous. Si vous n'y êtes pas, montrez que c'est vous qui avez raison, par votre art et non autrement, surtout pas l'égo. Et encore moins par analyse politique.
Les Lettres de noblesse des encriers, plûmes et papiers, ce sont les lecteurs, et eux seuls, qui les font. Car au final, qu'est-ce que lire, après tout, si ce n'est une rencontre, entre deux, en dehors et en dépit, de tout autre critère? Gardons, à l'esprit, l'essentiel.

Source :  Rose du désert Sahra (facebook)

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