Atlas info - Mohamed Lemine Ould Mohamed Lemine, né en 1936, quelque part, dans les environs d’Aleg, est instituteur de profession, depuis les années de l’indépendance (1957 – 1987). Il a été à Aoujeft pour ouvrir la première école moderne de ce hameau dont il devient par la suite le premier Directeur, cet établissement scolaire qui a formé les premières élites d’Aoujeft. Il deviendra progressivement, à la faveur de son intégration, de son ouverture, de son hospitalité et de son engagement, un habitant de premier plan de cette bourgade, aux côtés de plusieurs autres qui ont tous contribué, chacun de son côté, à la prospérité pédagogique, intellectuelle, sociale et urbaine d’Aoujeft.
On citerait ici à titre d’illustration aux côtés de Mohamed Lemine, Sow (infirmier), Mohamed Lemine Ould Sidina (réligieux), Mahfoudh Ould Bekaye (notable), Abdoullah Ould Hadi (notable), El Kory Ould Samba, Hamadi Ould Oumar, les Vaida, Ehl Zamel, Ehl Ahmed Abdi, Ehl Baha, Ehl Jiddou, El Mohamed Soultane, Ehl Bowba, ect.
Mohamed Lemine fut donc parmi les premiers enseignants du département d’Aoujeft, au temps, où, la Mauritanie, Etat naissant (indépendant) était contrainte de forcer les parents à inscrire les élèves à l’école moderne, confrontée aux défis de former les élites de demain à partir du néant.
Inquiétés par le sort de leurs enfants, les familles curieuses se rassemblaient devant les classes récemment construites, pour constater comment leurs fils font leur nouvel enseignement moderne.
Ils entendaient ainsi les tous premiers élèves rivaliser et répéter à leur enseignant, dévoué dans sa mission de relever le défi de la création des futurs cadres de la Mauritanie issus de ce canton, « Moi Monsieur, Moi Monsieur… », s’empressant de répondre aux petits exercices mentaux et pratiques de lecture, d’écriture ou de calcul à résoudre, à l’ardoise levée ou inscrits au tableau noir .
« Monsieur », c’est le nom qu’il a gardé malgré lui, toute sa carrière durant, et que sa famille et sa progéniture ont conservé après sa mort « Rahimehou Allah» en 1994 à Nouakchott à l’âge de 60 ans.
On dit ainsi « Ehl Monsieur », la « Palmeraie de Monsieur », Mohamed Ould Monsieur », etc.
Un nom qui a servi quasiment de l’unique appellation permettant aux habitants d’Aoujeft, dans la wilaya de l’Adrar, de ne pas se tromper sur lui et sur les nombreux acquis qu’il a apportés à cette ville qu’il a tant aimée et qu’il a veillé constamment à tirer de l’oubli, de l’enclavement et de l’ignorance .
Un hameau où il s’est fait pour l’anecdote et avec discrétion des hostilités, au point d’être qualifié, en raison de son caractère décomplexé pour s’adonner aux métiers (maçonnerie, menuiserie, bricolage, jardinage, travaux ouvriers..) de « forgeron » par un habitant de la moughataa.
Quelques années plus tard, son frère ainé lui rendra visite depuis Aleg et décidât d’exercer d’ouvrir une boutique, voire même de fonder une famille sur place, de laquelle il eut un garçon, avant de rentrer au fief.
Il s’est lié d’amitié avec l’homme qui qualifiait Mohamed Lemine de « forgeron » et duquel, il apprit qu’il est un Cherif (de la tribu Tenouajib).
Quelques mois plus tard, alors que cette amitié se renforçait, « Monsieur » de passage à la boutique de son ainé et s’adressant à son calomniateur, lui dit « si je suis tel, je suis le frère de votre ami ».
Ainsi pour dire, l’école de l’époque ne manquait ni de volonté, ni d’outils, mais bien au contraire réunissait toutes les conditions morales et physiques pour l’émergence d’hommes instruits, compétents, patriotes, corrects, et engagés.
La méthode d’enseigner d’El Marhoum Mohamedd Lemine n’était pas circonscrite à dispenser simplement un cours. Bien au contraire, elle était transversale et située à tous les niveaux. El Marhoum « Monsieur » était aussi un père tendre, un frère ainé, un ami, un secouriste, un tout.
Il s’intègre parfaitement à toutes les circonstances, très cultivé en présence des intellectuels, travailleur avec les ouvriers, ouvert avec les élèves, prêt à porter le fusil avec la sécurité (guerre du Sahara).
Pour l’anecdote, Aoujeft n’avait jamais été attaquée par le Polisario, mais une confusion entre les camions de la sécurité alimentaire ayant approché pour la première fois le canton, avait créé une panique chez les habitants, qui ont cru à une attaque imminente.
Quelques rares civils détenaient des armes et étaient prêts à défendre le canton dont El Marhoum, après avoir isolé les familles dans un lieu sécurisé (Libtayha).
Mohmed Lemine apportait les soins nécessaires aux élèves, veillait sur leur nourriture (Internat), et leur suivi sanitaire ainsi que sur leur éducation générale pour s’intégrer sans fausse note dans l’objectif recherché, consistant à devenir parmi les cadres de la Mauritanie naissante, sortie du désert, des Emirats et de la colonisation.
Il constituait la seconde famille des élèves qui trouvaient en lui tout le confort et les assurances au point de vouloir retourner au plus vite dans les classes et à l’internat une fois autorisés à rejoindre momentanément leurs parents.
Les élèves de l’époque (qu’il avait enseignés et formés) sont très nombreux. Ils sont devenus plus tard des éminents avocats, enseignants, officiers, techniciens de l’aviation …. On compte parmi eux, à titre d’exemple, pour ne citer que ceux là, le sénateur Yahya Ould Abdel Ghahar, l’ex Général Mohamed Ould Hadi, le technicien supérieur de l’aviation Abderrahmane Ould Houmoud, l’administrateur Ahmedou Ould Mohamed Sultane, le colonel des douanes Mohamed Ould Ahmed Abdi, Cheibetta, le Colonel Hamoud Ould Samba, le haut administrateur Sid’Ahmed Ould Bekaye, etc.
Mohamed Lemine s’est illustré par son hospitalité légendaire. Sa maison était ouverte nuit et jour à tous les habitants d’Aoujeft dont ceux qui viennent des localités éloignées pour se soigner ou s’approvisionner ou encore pour confier leurs enfants à l’enseignement.
En effet, il s’est engagé, pendant toute sa vie à Aoujeft dans toutes les activités qui rentrent dans le développement social et économique de la ville.
C’est ainsi qu’il initiait et formait les populations aux avantages du volontariat, à prendre leurs affaires et leur avenir en leurs mains pour favoriser leur bien-être, prospérité et développement local.
De nombreuses routes, perdues dans les dunes et les montagnes, dessinées par les seules traces des véhicules, aux déviations nombreuses et souvent impraticables de l’époque (Aoujeft, Tourvine, Aoujeft –El Medah, Aoujeft-Timinitt, Aoujeft- Toungad) avaient été réalisées et tracées par les Aoujeftois eux-mêmes encouragés et soutenus par Mohamed Lemine.
Des dizaines de km inhabités, sans eau, où les hommes portaient les outres sur leurs têtes sur plusieurs distances pour amener l’eau aux volontaires dont lui-même, chacun, à tour de rôle, dans l’équité et le respect mutuel.
C’est seulement avec la maladie et l’âge qu’il a décidé de se rapprocher des siens à Aleg, en s’installant à Nouakchott. Il repose actuellement au cimetière « Athme Nour » dans le lac d’Aleg aux côtés de sa mère « Rahmetou Allahi Aleyhoum Jemian ».
C’est là un hommage modeste, mais un hommage qu’à même qui s’efforce relativement de présenter les qualités d’un homme pour lequel les Aoujeftois prient jour et nuit et remercient pour leur avoir permis d’être dans le navire du développement de la Mauritanie.
Md O Md Lemine
PS: Nos excuses vont sincèrement aux personnalités et cadres d’Aoujeft qui devaient être valorisés ici au même titre que les autres et qui ont été involontairement omises.
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