Aujourd’hui, 7 janvier, est le 1er anniversaire de l’attentat contre la revue satirique française Charlie Hebo. L’opération avait fait une douzaine de victimes.
Auparavant, Charlie Hebdo avait suscité la colère et l’indignation de la majorité des musulmans en publiant des dessins violents se moquant du prophète Mohamed (PSL). De telles provocations servent naturellement d’alibis pour les terroristes djihadistes pour justifier leurs actions criminelles et nourrir leur propagande. Elles avaient suscité également un certain dégoût chez pas mal de lecteurs non musulmans. C’est probablement ce qui a fait que la revue satirique vivait une situation difficile au moment de l’attentat : un tirage réduit à 30000 exemplaires au maximum, de grandes difficultés financières…
Pour sortir de cette situation, elle payera un prix trop élevé pour trouver un sauveteur. Il sera paradoxalement l’ennemi « djihadiste » qui a cherché à faire taire pour toujours cette voix provocatrice « anti religieuse ». C’est ainsi que sur ordre de la bracnche yéménite d’Al qaida, les frères Kouachi, armés de kalachnikov, réussirent le 7 janvier de l’année dernière à 11 heures du matin à s’introduire dans les locaux de Charlie Hebdo et ouvrirent le feu sur l’équipe du journal qui se trouvait en réunion en ce moment.
Bilan : 8 membres de l’équipe du journal sont morts sur le coup : 5 dessinateurs, 2 chroniqueurs et 1 correcteur ; plusieurs blessés graves dont : le dessinateur Riss directeur de rédaction qui deviendra l’actuel directeur du journal, 2 journalistes, 1 webmaster.
Sortis indemnes les assassins crièrent en regagnant leur véhicule: « On a vengé le prophète Mohammed. On a tué Charlie Hebdo ! ». Ils se trompent : ils n’ont rien vengé et ils viennent de sauver Charlie.
Deux jours plus tard, Amedy Koulibaly, en coordintion avec eux et, probblement, pour couvrir leur fuite, a réussi lui aussi à pénétrer dans un magasin et à prendre en otage ceux qui s' y trouvaient, en faisant plusieurs victimes.
Aussitôt connus, ces drames ont déclenché un très grand mouvement international de sympathie et de soutien en faveur de Charlie hebdo et de la France. Son mot d’ordre : « Je suis Charlie ».
Condamnations populaires et messages de soutien affluent de partout vers la France et vers le journal. Paris connaîtra la manifestation populaire la plus grandiose de son histoire. Une manifestation qui a vu la participation de très nombreux leaders et chefs d’Etats, y compris plusieurs dirigeants de pays musulmans et arabes. On signale cependant qu’aucune autorité mauritanienne n’y était.
Aux formes multiples, morales et matérielles, ce soutien généreux a sauvé Charlie Hebdo qui se débattait dans les difficultés.
RFI dessine le nouveau tableau reluisant : « Immédiatement, les dons affluent : 4,3 millions d'euros en quelques semaines. Et les abonnements bondissent : plus de 200 000. Le numéro des « survivants » sorti le 14 janvier s'arrache à plus de sept millions et demi d'exemplaires. Du jamais vu dans l'histoire de la presse française ! ». On est alors tenté de penser cyniquement que les survivants devraient dire : « Merci Al qaida »
Et dans ce numéro des « survivants » on retrouve des caricatures sur le prophète Mohamed (PSL) qui sont encore blessantes pour les musulmans. En réaction, des populations sont sorties dans les rues dans plusieurs pays musulmans. En Mauritanie, les manifestants furent accueillis par le Président de la république. Dans un mot qu’il leur a adressé, Ould Abdel Aziz a souligné le combat de son pays contre le terrorisme ainsi que sa désapprobation et son indignation face à tout acte provocateur visant l’islam et pouvant servir de mobile ou d’arguments pour les terroristes. Il a dit en substance :
« Comme nous avons eu à combattre le terrorisme à l'intérieur de notre pays et à faire de grands sacrifices pour sa stabilité, nous condamnons aujourd'hui les agissements qui génèrent le terrorisme tels que les caricatures blasphématoires pour notre religion et pour toutes les religions d'ailleurs.
Autant nous condamnons ces caricatures, autant nous condamnons tout acte terroriste et toutes les formes de marginalisation, d'injustice et d'agression partout dans le monde et particulièrement contre les Musulmans.
(…) je ne suis ni Charlie, ni Coulibaly (…) je ne participerai à aucune marche, ni ne soutiendrai, toute ma vie, une quelconque attitude orientée contre l'Islam, que je sois Président ou simple citoyen ».
Aujourd’hui, une année après jour pour jour, cet acte terroriste continue de propulser Charlie Hebdo au rang de symbole de la liberté d’expression. Un rang qui lui assure une bonne situation : Le numéro spécial de ce matin qui commémore le 1er anniversaire de l’attentat a été tiré à un million d’exemplaires. Et sa ligne éditoriale n’a pas changé : il caricature Dieu en l’assimilant à un « assassin qui court toujours ». Ce qui pour certain lecteurs est plutôt synonyme de : « Charlie court toujours »
Sans Al qaida, la nouvelle équipe n’avait aucune chance de réussir un « redressement » financier aussi inattendu que spectaculaire. Comme quoi l’organisation criminelle, Al qaida, en assassinant les 8 journalistes de Charlie Hebdo, fournit sans le vouloir une grande manne financière et un très large lectorat aux survivants du journal. On irait toutefois pas jusqu’à dire que les malheurs des uns font le bonheur des autres. En effet, l’actuel duo dirigeant, Riss, et Eric Porthéault, est toujours traumatisé, les deux hommes se sentant malheureux en pensant au contexte dramatique qui a favorisé leur nouveau « succès » bâti sur les retombées de l’assassinat de leurs collègues et compagnons.
Les conséquences de tout cela montrent que si la lutte contre l’extrémisme passe par la voie de l’extrémisme le résultat est inévitablement contre productif. Autrement dit : extrémisme contre extrémisme donne plus d’extrémisme. Que la presse et tous les relais d'opinin évitent alors de baigner dans la provocation inutile qui favorise l’émergence et le développement du terrorisme.
EL Boukhary Mohmed Mouemel