Etrange destinée pour un parti historique comme le RFD, qui a passionné et divisé le monde politique pendant un quart de siècle par sa pureté idéelle, la grandeur de ses objectifs et l’idolâtrie de son chef, pour se retrouver aujourd’hui dans une situation peu enviable qui rappelle à s’y méprendre une sortie pure et simple de l’Histoire. Cette déchéance polititique couvait en réalité depuis belles lurettes, en raison de la conjonction de plusieurs facteurs qui n’ont cessé de le faire descendre du piédestal sur lequel il se croyait éternellement juché au bas fond dans lequel il est empêtré aujourd’hui.
Ce parti croyait profondément, de cette croyance idéologique aveugle, que son parcours historique, les sacrifices consentis, faisaient de lui le seul parti qui compte et vaille l’espoir pour le pays. Cette forme dangereuse de pureté et de passion politiques, cette auto-suffisante, cette référence béate à l’histoire, aveuglent toujours ses ténors et les confinent dans une espèce de sophistique et de schizophrénie politique qui entretiennent en permanence des illusions dogmatiques, des visions chimériques, des schémas mentaux abstraits et des mystifications holistiques. Elles les empêchent de penser la politique comme un processus dynamique et évolutif ; un processus qui ne peut reposer exclusivement sur une nostalgie qui laisse toujours le politicien cloitré dans un tête-à-tête permanent avec le passé qui est passé. Au contraire, le processus politique ne peut avoir comme boussole, comme étoile, comme référence que le contexte historique présent avec ses exigences, ses nécessités têtues et ses réalités concrètes.
Or la principale nouveauté de notre époque est la démocratie qui a pour fondement la culture démocratique avec laquelle disparaissent les rapports enfermés dans une armature de passions et de haine qui rendent quasiment impossibles tout dialogue entre les formations politiques. Une culture démocratique dont l’essence est le dialogue qui permet à tous les partis politiques, nonobstant leur positionnement dans l’échiquier politique national, de se parler, de s’écouter, sans préalables ni tabous, loin de l’esprit de la vindicte à la petite semaine, de l’esprit du jeu à somme nulle, c'est-à-dire qui ne peut être que totalement gagné ou totalement perdu. Un dialogue où la pondération, l’ouverture, et surtout l’intérêt national, conduisent à des concessions mutuelles au service de notre bien commun. Et c’est précisément ce refus obstiné du dialogue national sans justifications plausibles, qui a constitué pour le RFD la goutte qui a fait déborder le vase ; un vase déjà plein par les erreurs cumulées depuis longtemps.
L’implosion a été cette fois-ci fatale et le RFD, déjà fragilisé par ses erreurs infantiles et son « jusqu’au boutisme » légendaire, rejoint ainsi le musée national des virtualités inaccomplies au coté des idéologies nationalistes arabes et négro-africaines, du marxisme , de l’Islam politique , des courants ethnicistes ; idéologies qui n’ont pas vu par aveuglement onirique et par vision désuète que la Mauritanie du Président Aziz a fondamentalement changé, qu’elle force son allure dans la voie du développement et de l’ancrage de l’Etat de droit et de la démocratie, laissant les extrémistes de tout acabit ramer dans le désert.
Docteur Abdallahi Ould Nem