Résultats du dialogue : Le tour est-il joué ?

"La chute n’est pas un échec. L’échec c’est de rester là où on est tombé"

La fulgurante et presque inattendue déclaration du Président de la République à l’occasion de la cérémonie de clôture du dialogue dit inclusif de ne pas formuler le vœu de briguer un troisième mandat, ne risque-t-elle pa de remodéler les cartes ? « Certainement  pas ! », répondront les leaders et partisans des parties boycotteuses et de l’APP participant  jusqu’à sa volte-face de l’ultime étape précédant les conclusions.

Certes, la teneur de tout acte se mesure à sa fin et l’issue de tout dialogue ne  peut en aucun cas être  négative.

Le premier constat s'impose de lui-même à chaque bout de tunnel dont sort tout dialogue fortement poussé à l’extrême par les bonnes et entreprenantes volontés forcément présentes parmi l’ensemble des acteurs impliqués.

Le second constat est indéniablement celui que tout le monde sait mais n’en réalise vraiment pas la gravité malgré son évidence toute crue et manifeste à travers les échanges sur les questions de débats et de divergences  qui constituent en soi le tamis invisible mais palpable qui distille les ambitions chimériques de positions prises et les ramifications  de visions antagonistes, d’interprétations individuelles, de préjugés et de toutes autres conclusions contradictoires.

C’est partant de ces constats qu’il devient obligatoire aux belligérants de se surpasser pour répondre aux signes et appels à dialoguer quels que soient par ailleurs  les différences de perception des problèmes pourtant communs, les objectifs à atteindre semblables en leurs hautes portées et l’échelle de valeur de leurs contradictions. C’est en cela que les protagonistes peuvent seulement faire entendre les uns aux autres leurs points de discorde, analyses, visions, traitement idéologique, et permettre d’entrevoir horizons et champs d’ouverture politique dénudée de dogmes. Et la Mauritanie fortement plurielle et paradoxalement en mal de cette expression étouffée en est pourtant et pour sa stabilité impérieusement dépendante.

Les nombreuses thématiques abordées  - à battons rompus tout au long du dialogue boycotté par l’opposition radicale, le RFD et quitté dans ses derniers moments par l’APP - ont permis de débattre sans lignes rouges ni tabous de questions aussi sensibles que le passif humanitaire, la constitution, l’esclavage, la pauvreté, la décentralisation, le drapeau et l’hymne nationaux. Et de grandes avancées ont été obtenues sur ces thématiques. Mais le plus surprenant c’est bien évidemment l’aveu fait dans le discours de clôture par le Président Mohamed Ould Abdel Aziz de ne pas enfreindre ni déroger à l’article 99 de la constitution et au contenu de l’article 28: …"Si certains s'opposent à l'amendement de ces aspects par souci de renouveler la classe politique, c'est une vérité, puisqu'il ne faut pas modifier la constitution pour l'intérêt d'une personne précise, d'une catégorie donnée, du fait qu'il y a des fondamentaux dans la constitution qui ne peuvent être transgressés, du fait de l'impératif de consolidation de la démocratie et du développement. S'agissant de l'article 28, sa modification ne sert que l'intérêt d'une seule personne, en l'occurrence le Président de la République…  En conséquence, la constitution de la République ne doit pas être la risée de certains, à travers sa modification pour servir les desseins d'une personne précise ou d'une entité donnée, mais doit s'effectuer sur la base de l'intérêt général, afin d'ancrer la démocratie. C'est cet objectif pour lequel nous devrons œuvrer. "

Si cette déclaration a surpris plus d’un dans la majorité où plusieurs partis, l’UPR en tête, avaient tambours battant véhément versé dans l’appel à un troisième mandat, elle a de l’avis de beaucoup de Mauritaniens et d’observateurs neutres fauché l’herbe sous les pieds de nombreux opposants.

Le tour est-il pour autant joué ? Et la classe politique en prendra- t- elle acte : va-t-elle s’atteler à inaugurer une nouvelle étape plus sereine et mieux orientée sur les véritables questions nationales?

En tout état de cause, ce discours aux allures de tour de main politique prodigieux fera couler beaucoup d’encre et reconsidérer plusieurs repositionnements au sein des partis excessifs de la majorité, de l’opposition modérée perturbée et de celle boycotteuse acerbe.

En attendant, les pôles politiques vont s'évertuer, en réunissant leurs bureaux politiques, à sortir après débats, analyses et approches consensuelles, des positions politiques déclarées et à faire valoir que la chute n'est pas l'échec qui n'est que de rester là où on est tombé.

El Wely Ould Sidi Haiba

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