L’article suivant fait apparaître un grave déficit en matière de communication de crise en Mauritanie. Avec une aisance saisissante, Ely Salem Khayar, directeur d’ADRAR INFO, tire la sonette d'alarme en revenant sur le meurtre du Marché de la Capitale survenue mardi passé. Il déplore l'absence de toute comminication efficiente à cette occasion de la part des autorités en vue d'éclairer et de rassurer une opinion publique horriblement émue et brusquement désorientée par un crime aussi odieux qu'incompréhensible.
Malgré son sens de retenue, l’auteur peine à cacher sa colère et son indignation face à ce type de carence qu'il juge notoire, et qui est particulièrement préjudiciable pour les nations. Sous un titre légèrement différent du sien, MAURITANIA AL MALOUMA ( mauriactu) reproduit intégralement son cri d'alarme ci-dessous :
« Le droit à l’information est un besoin humain nécessaire à la vie en société. Chez nous, il est malheureusement assujetti à deux manquements majeurs :
D’une part, l’absence des sources crédibles de l’information et d’autre part, l’inexpérience avérée des journalistes.Concernant le premier point, L’État, via toutes ses institutions ne communique pas assez et si tel serait le cas quelquefois, le traitement de l’information par les médias publics et privés reste inconséquent. Résultat : Le public et les décideurs politiques ne se retrouvent pas dans le même vaisseau naviguant le devenir de notre pays. Les deux parties gagneraient à s’inspirer de modèles bien rodés dans d’autres pays de par le monde. La France par exemple.
Celles et ceux d’entre nous qui ont suivi les attentats du 13 novembre dernier à Paris (Dieu nous en garde) ont remarqué combien les citoyens français et par delà ceux du monde, étaient satisfaits du système de communication qui a couvert ces tristes événements.
Sources d’information
Dés constatation des premières explosions et comme pour contrer toute rumeur ou fausse information, la machine française de communication , savamment synchronisée et hiérarchisée fut vite démarrée, offrant à tous les citoyens de ce pays, le même droit à recevoir et suivre, en temps réel, ce qui se passe chez eux.
D’abord, le Président de toute la France, s’est empressé cinquante deux minutes seulement après les fusillades crépusculaires, de s’adresser à la Nation par voie de presse, confirmant l’existence d’attentats, leur gravité et informant les Français des mesures urgentes qu’il a prises conformément aux prérogatives que lui confèrent la constitution ( état d’urgence et fermeture des frontières).
Deux heures plus tard, il reviendra, après concertation avec les membres de son « comité de crise » pour annoncer plus amples d’informations.
Le lendemain, le premier ministre, le ministre de l’intérieur et le procureur de la république se relayèrent devant les micros, à quelques laps de temps d’intervalles, l’un l’autre, pour communiquer, minutes par minutes, le film des événements, les dispositions prises et les comportements à adopter par les citoyens.
Puis suivirent les politiques, parlementaires, responsables de sécurité, hommes de terrains et autres chargés de la protection civile, toujours par soucis d’éclairer l’opinion publique.
Traitement de l’information
Informés à temps, par voie officielle et source sure, les organes de presse français n’ont plus qu’à suivre, recueillir, traiter et fournir aux lecteurs, auditeurs et téléspectateurs : photos, témoignages et commentaires de spécialistes, étayant, infirmant ou confirmant la véracité des faits.
En écoutant RFI ou radio Monte Carlo , en regardant France 24 et TF1,ou en lisant le Monde, le Figaro, etc., on ne peut que remarquer la concurrence loyale que se livrent ces divers organes de presse à se procurer la meilleure qualité et primeur des images, reportages, interviews tout en évitant excès inutiles , photos choquantes, mots blessants etc .
Par cette maitrise de l’information distillée, ces divers médias ont gagné les cœurs de leurs clients, abonnés et destinataires. Plus encore !!! Ils ont immunisé le public contre toute rumeur, commérages, fausses nouvelles génératrices de dérapage, désordre, peur et désolation.
Et si chez nous... .
Avant hier, (pour ne citer que le dernier crime odieux), une paisible commerçante fut abominablement assassinée, en sortant vers dix neuf heures de sa boutique, sise au marché de la capitale, en plein centre ville.
La presse locale s’en est saisi pour en faire le « scoop » médiatique du moment. Se fondant sur les ouï-dire, elle diffusa des sornettes et scénarios fantaisistes et invraisemblables, incriminant sans preuves ni témoignages qui et comme elle veut.
Seize heures après le drame, aucun responsable officiel ou organe de presse étatique n’a fait la moindre déclaration ou apporté le mini éclaircissement concernant l’événement qui a ébranlé la conscience de toute la population.
Interpellé le lendemain, lors d’une séance parlementaire( initialement programmée) ,sur la montée vertigineuse de l’insécurité à Nouakchott et sur ce cas précis , le ministre de l’intérieur n’a pas trouvé mieux que « politiquer » en Hassaniya mal égrené, des généralités fades de sens dont , entre autre : « Nouakchott a été découpée en trois zones administratives confiée chacune à un corps de sécurité distinct : gendarmerie, police et garde ».
Sait-il ,ce ministre que les citoyens estiment quant à eux ,que les causes et raisons principales de l’insécurité à Nouakchott sont en grande partie dues à l’inter-confusion et interférence des rôles , responsabilités et vocation : « non ! Ce n’est pas moi, c’est lui » de ces trois corps de sécurité ?
Il a fallu, comme par le passé ( et probablement l’avenir) , que la colère populaire déborde devant le palais présidentiel pour que les « sapeurs » invitent à la TV publique, un responsable de police pour annoncer : « Le criminel, (toujours un drogué ou malade psychiatrique), a été appréhendé et mis aux arrêts ». Outow-v !!!
Aucune photo de la victime, ni de l’agresseur, ni du lieu du drame, encore moins de témoignage, arme du meurtre, attroupement populaire, n’a illustré les propos de ce haut gradé de la sécurité nationale …..Peut on nous y fier ?
La communication, à l’instar des autres chantiers de développement en mal d’aboutir chez nous, continue de patiner faute de chaine de traction ».
Ely Salem Khayar
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