Les problèmes variés et tentaculaires que vit notre société et qui la menace dans son unité sont dus en grande partie aux régimes qui se sont succédés dans notre pays.
La responsabilité d’une autre partie due au mode d’organisation sociale dominant. Toutes les sociétés humaines , même animales, renferment des phénomènes négatifs et positifs. L’esclavage, par exemple, est un produit de la division sociale du travail à son origine. Mais si cela était « admis » par les premières communautés, en étant une nécessité pour la production des richesses et de l’abondance, il aurait dû être aboli par les régimes qui se sont installés après l’indépendance.
Ces régimes auraient dû instituer des bases idéologiques et pratiques afin de produire un système de valeurs modernes qui remplace ce sale panier de valeurs dégradantes et honteuses.
Le terrain était favorable pour lancer cette base idéologique moderne grâce à l’Islam qui insiste sur l’égalité , la tolérance et la miséricorde, sur le respect de l’être humain sans distinction de couleur ou de race.
L’Islam insiste fortement encore sur l’idée du respect et de la compréhension afin d’établir la justice et le droit pour lesquels cette religion est venue. Cette religion qui nous instruit de faire entendre la voie de la justice par les meilleurs moyens. Nous responsabilisons en partie, donc , ces régimes qui n’ont pas fait l’effort nécessaire ; nous pouvons même affirmer qu’ils ont tout fait pour perpétuer ce système de valeurs honteux, et encore renforcer l’assise sociale désuète telle qu’elle existe dans un but électoraliste lorsque c’est nécessaire.
Les réactions que nous observons au niveau de la couche sociale arabe brune, c’est- à- dire les Haratines, malgré les phénomènes existants parfois violents , sont compréhensibles tant que l’unité de la société est préservée.
Cette lutte doit aboutir à arracher les droits légitimes et à restituer la dignité humaine piétinée à une couche sociale généreuse. Elle était, elle restera à l’avant- garde des bâtisseurs de l’état national.
Cette couche, Haratines , a lutté ensemble avec nos camarades dans les rangs du parti Baath durant la période des années de braises pour arracher les droits de cette couche afin qu’elle occupe sa place légitime au sein d’une société juste et unie.
Autant nous insistons sur la légitimité de cette lutte avec un souffle civilisé, autant nous insistons pour cette couche de s’éloigner de l’esprit agressif envers les autres couches car l’adversité ne mène pas vers des résultats positifs. Elle éloignera plutôt la sympathie des forces du progrès et les hommes libres au niveau du pays, qui plus est nuisible à la réputation de cette lutte honorable.
Les Haratines, grâce à leur conscience élevée, connaissent et mesurent très bien le poids des injustices qu’ils ont subi durant les époques passées , et savent également que ces injustices proviennent de la part de ceux qui étaient liés avec eux par des liens sociaux mêlés aux liens de consanguinité , aux sentiments, et à des intérêts communs en plus des coutumes, traditions, culture, langue, folklore… le destin commun.
La relation entre ces deux couches sociales arabes était une relation d’exploitation mélangée avec des sentiments humains quelquefois utiles pour tous, mais dominés, certes, par l’injustice. Cela explique la forte relation qui existe entre les deux couches.
De là, les nationalistes arabes progressistes, les Baathistes en tête, et ceux qui possèdent une vue unioniste éclairée des deux couches sont devant deux obligations et devoirs :
- Le devoir d’adhérer à la lutte légitime et humaine qui exige l’aide et la participation de chaque citoyen noble jusqu’à ce que cette couche récupère ses droits et ses valeurs humaines dans le cadre de l’unité de la société, en protégeant et en gardant tout ce qui est utile dans les relations d’amitiés et de parenté.
- Le devoir consiste à faire face et à combattre le discours belliqueux , l’insulte et la haine d’où qu’ils viennent. Ces attaques sont attisées et nourries par des éléments dont les intérêts sont liés aux projets étrangers qui oeuvrent depuis longtemps pour semer la division et le déchirement du tissu social de notre société. Ces éléments se cachent avec les diables dans les détails.
De tels discours dangereux se caractérisent par une violence verbale liée à des conjonctures saisonnières plus proches de la surenchère que d’un combat social sérieux. Ils expliquent l’ignorance et l’analphabétisme qui existent chez la majorité de cette couche qui ne fait pas la différence entre un discours révolutionnaire unitaire et nationaliste qui vise à libérer les Haratines de la situation d’injustice et de la misère en mobilisant toutes les forces positives dans la société autour de ce projet ; et un autre discours qui vise à enterrer l’identité culturelle et nationaliste des Haratines en les transformant en une machine de destruction entre les mains de l’étranger ; ces exploiteurs sans âme ne se sont jamais souciés des manques ou des besoins de cette couche qui sont illimités que cela soit du pain à manger, de l’eau à boire, et encore moins d’aider les personnes âgées de cette couche, tant peu que cela soit.
La situation des Haratines est une responsabilité sociétale au sens inclusif. Elle commence par l’imam de la mosquée, l’enseignant à l’école primaire, le médecin à l’hôpital ou à sa propre clinique, l’éducateur, l’étudiant et le professeur à l’université , les prêcheurs … les Chouyoukhs dans les Zawias . bref, tout le monde là où il se trouve.
Les Haratines n’ont pas besoin d’incitation à la confrontation avec toute la société, encore moins à devenir les ennemis des autres couches sociales, ou à faire d’eux une couche déprimée et désespérée. Après toutes les injustices qu’ils ont subi, les Haratines ont besoin d’être aidés à occuper la place honorable qui leur sied, c’est- à – dire à une réadaptation sociale et économique qui hisse cette couche à vivre les mêmes conditions de vie et avoir les mêmes chances de réussite que toutes les autres couches .
cette action est une responsabilité nationale en général et des anciens privilégiés ( les anciens maîtres) en particulier . ils ont une responsabilité morale envers ce legs du passé et ses conséquences.
Du moment que nous assistons à un consensus national qui condamne ce passé et qui ressent la douleur de ses victimes , ce qui est importent déjà, il reste qu’il est nécessaire de refaire un autre consensus autour d’un programme national qui consiste à tourner cette page noire de notre histoire à travers un ensemble de mesures étudiées favorisantes sur les plans politique, économique, et surtout éducatif et social, qui répondent aux besoins des grands ensembles de cette couche comme les Adwabas ; de cette manière leurs fils se hissent au niveau de la société, qui bénéficiera elle-même de cette force ajoutée. Tout le monde est conscient que les séquelles laissées par l’esclavagisme sont non seulement un frein pour le développement de la société mais aussi et surtout une honte pour nous tous.
Ce programme national où tout le monde sera présent lors de l’élaboration et de son application restera loin des manipulations politiques et des calculs électoralistes, loin aussi des opportunistes et des incitateurs à l’anarchie.
A cet effet, si nous lançons notre appel, en toute sincérité et fidèlement à nos convictions pour la réussite de cette action spécifique ; cela ne signifie pas que les autres couches sociales nagent dans l’aisance et se pâment de joie dans les paradis ; ou bien encore que tous les haratines vivent dans l’enfer. Ce qu’on veut dire en toute franchise et toute conscience est que la majorité des haratines vivent dans la misère criarde, et que cette misère est le résultat d’un esclavagisme injuste et inhumain. Cet esclavagisme qui a retardé toutes les énergies et forces créatrices de cette couche arabe, ensevelie depuis des siècles.
Au mois de février passé, deux articles importants sont apparus. Ils ont été écrits par deux personnalités politiques appartenant à deux idéologies différentes. ces textes traitent la situation sociale et politique en Mauritanie.
- La première, c’est Mohamed Salem ould Merzough qui a écrit sous le titre : la Mauritanie et la revendication historique nationale. Nous signalons que Ould Merzough était un ex- dirigeant marxiste issu des arabes bruns, les haratines.
- La deuxième, c’est Mohamed Vadhel ould Isdi Haiba qui a écrit sous le titre : l’avenir est pour les arabes bruns..
Celui- là était un ex-dirigeant Baathiste. Il est issu d’une famille religieuse de grande notoriété spirituelle en Mauritanie, et descendant des arabes blancs.
Vu le sérieux de ces deux textes qui comportent une grande charge de patriotisme et d’équité, et une vue d’avenir respectable, Darb el Arabi s’est permis d’en rapporter à ses chers lecteurs les idées principales, en débutant par l’article de ould Sidi Haiba : « une donnée apparaitra dès aujourd’hui qu’il sera difficile d’ignorer ou de minimiser, l’avenir en Mauritanie appartiendra sans aucun doute à cette couche sociale qu’ils dénomment par esprit de sectarisme ( les haratines) parce que cette couche est préparée objectivement pour arriver au pouvoir ».
la deuxième vérité fondamentale est que l’identité culturelle arabe en Mauritanie qui essouffle la majorité du peuple Mauritanien reste intacte heureusement dans la conscience. Cela s’ajoute au noyau dur de l’élite arabe blanche qui demeure attachée à sa conviction malgré la démission de sa « première ligne ». la couche sur laquelle il faut compter conjointement avec leurs frères blancs pour provoquer le changement tant espéré c’est la couche des arabes bruns ( les haratines) parce qu’elle a gardé sa personnalité propre non polluée par l’occidentalisation, et l’aliénation culturelle, la soumission aux cercles colonialistes et la traîtrise avec la France. » et ould Mohamed Vadhel d’ajouter « la couche d’arabes bruns naturellement n’abandonnera pas la lutte militante contre l’esclavage et ses séquelles ; il n’y a aucun doute sur sa détermination à jouer un rôle dirigeant avec ses frères arabes blancs et ses frères négro- africains nationalistes pour sauver la Mauritanie ( …) »fin de citation.
les anciens asservis du fait des séquelles laissées par l’environnement social ont été profondément atteints dans leurs âmes. Ces injustices ont retardé leurs intelligences et leurs capacités intellectuelles communes à tous les êtres humains : L’interdiction imposée, l’empêchement fait à leurs enfants de bénéficier des droits à l’éducation , et le rejet injuste de fréquenter les centres de pensée liés aux domaines social, culturel, économique et militaire qui auraient pu faire exploser leurs énergies et leurs forces mentales ont provoqué un délaissement des affaires liées à la société des « asservisseurs ».
ainsi, la société a été amputée d’une grande partie de sa force créatrice à cause de cette division injuste du travail. Les études approfondies en sociologie confirment que les personnes qui vivent les conditions difficiles subissent des traumatismes qui affectent leurs capacités mentales et sentimentales.
Les enfants orphelins, par exemple, restent longtemps diminués aux plans d’intelligence et de l’équilibre psychologique. Nous n’oublions pas que la plupart des enfants des ex- esclaves ont vécu la situation de l’orphelinat. Les enfants sont séparés de force de leurs parents à vie, ce qui provoque des chocs immenses dans leurs âmes et des traumatismes inguérissables.
Tout ceci impose une considération spécifique à l’égard de ces citoyens, à l’égard des descendants des anciens esclaves. Ce sursaut doit inclure tous les domaines économique, social, éducatif et surtout psychologique. Notre prophète Mohamed (psls) demeure notre excellent idéal en mariant Zayd Iben Haritha avec sa cousine Zaynab bent Jahshine . l’incident est explicitement mentionné au Coran.
lorsque tout un chacun acceptera et oeuvrera pour que réussisse cette idée qui consiste à lancer un plan spécial de redressement des niveaux de vie de toutes les couches sans exclusion ou sans état d’âme ,alors on pourra dire que la société Mauritanienne s’est rattrapée. Alors seulement on pourra être fier de notre appartenance à la Mauritanie arabe et musulmane. Les facteurs de disparité économique disparaîtront, la différence dans la couleur de la peau sera une richesse et non une cause de malheur. On aura des bourgeons qui deviennent des fleurs, des fleurs qui donnent des fruits. Le fruit dans cet exemple c’est l’unité de notre société et sa pérennité.
Dans le numéro du mois d’avril passé de Darb el Arabi , on a fait mention à deux articles importants écrits par deux personnalités Mauritaniennes différentes idéologiquement. La première est un ex- dirigeant Baathiste dont on a résumé brièvement l’article précédent. Quant à la deuxième, l’ex- marxiste ould Merzough , il a écrit un sujet intitulé : la revendication historique des arabes bruns et les solutions raisonnables proposées : « dans ce sillage, je crois encore que nous devrions mettre l’accent sur la justice sociale et ses prolongements utiles dans un but mixte à savoir l’unité nationale et la réconciliation sociale … pourquoi ? parce que dans la vie de n’importe quel peuple ou nation ; à une époque donnée , il existe un défi qui résume le présent et détermine l’avenir.
C’est , selon mon point de vue, la fonction actuelle de la justice sociale. Elle résume le pari fondamental pour notre avenir commun ; le pari ou choc pour l’égalité dans tous les domaines ( révision du système éducatif, remise en cause des relations et des normes sociales et économiques , compression des différences dans les revenus, résoudre le problème des disparités régionales, participation élargie dans les pouvoirs … ». et d’ajouter : « la justice égalitaire et conciliante constitue une assise solide pour améliorer la qualité des relations sociales ; c’est la clé pour une association et pour le destin… ». « devant tout cela , il est absurde de croire qu’il est possible de désamorcer tous les problèmes liés à l’esclavage en dehors de l’état de droit, ou en dehors des institutions fortes et spécialisées, en réorganisant également nos relations économiques et sociales , au sens qu’on prenne un ensemble de mesures adéquates et mesurées dans le temps en lien avec les perspectives sociales, syndicales, agraires, éducatives, culturelles et psychologiques au niveau des maîtres et des asservis. On doit également agir avec prudence et d’une manière juste et équilibrée sur l’action relative à la participation dans le pouvoir, (…) afin d’éviter de tomber dans l’illusion ; on affirme qu’il existe des contradictions historiques importantes qui soulèvent des débats qui ne trouveront de solutions qu’avec le temps et l’évolution de la société(…).
Lors qu’on lancera les fondements d’un nouveau système social ascendant et prometteur, on peut dire qu’on a bâti la force inébranlable qui garantit notre réconciliation nationale et sociale, et enfin, il est utile de répéter les évidences suivantes : l’esclavagisme, l’ignorance des autres, l’ironie, la moquerie mènent vers l’impasse et le regret ». fin de citation.
( voir le journal El emel, en date du 17 février 2015)
Le secrétariat à l’information et à la culture.
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( * ) Traduction en français de la série d’articles en arabe intitulés (Les Haratines, cette couche sociale opprimée )
Publiés à Darb Al Arabi .
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