La gabegie … Ce mal incurable / El Wely Sidi Haiba

Il est bien établi que la gabegie et ses corollaires (corruption, dilapidation, népotisme…) demeurent des obstacles majeurs au développement et leurs effets sont désastreux. Contrairement à la thèse développée et soutenue par les nostalgiques des anciens régimes donnant récente l’apparition de ces maux, en Mauritanie, la ligne de la gabegie a accompagné les premiers coups de pioche de la mise en place des structures de l’Etat indépendant. Certainement qu’elle a atteint aujourd’hui un record destructeur qui cautionne inexorablement le sous développement ambiant.

Et même si ailleurs, où les choses vont beaucoup mieux, les adeptes cyniques d’une certaine école économiste en vogue - avec des professeurs réputés - prétendent que la corruption, pan le plus en avant de la gabegie, graisse la machine du développement et la fait fonctionner. En Mauritanie, c’est elle qui a perverti un processus de développement amorcé il y a plus d’un demi-siècle.

 Mais bien ankylosée le pays s’était mis par la suite à refuser de fendre les lames de l’impétueuse vague de la gabegie qui s’est mise à balayer tout espoir d’essor et à favoriser un attentisme déplorable.

Aujourd’hui, beaucoup s’accordent à dire que de grands efforts de construction palpables ont été opérés ces dernières années ; efforts qui ont globalement concerné les infrastructures routières, cheville ouvrière de toute action de développement, l’électrification, les ouvrages hydrauliques, la santé, les aéroports, les ports, les établissements de l’enseignement supérieur, les aménagements agricoles, l’émergence de nouveaux centres communautaires urbains dynamiques (Chami, Nbeyket Lehwach, Termessa) et l’amorce d’un combat contre la gabegie, la corruption et le détournement de deniers publics par la de mise en place d’un arsenal juridique aussi complet que solide.

Or, malgré ce constat positif incontestable, ces réalisations obtenues qui sont de taille et de grande importance et celles à venir restent, en amont. Elles sont fortement sont soumises dans leur édification à la menace des effets pervers de la corruption et du favoritisme ; ce qui en aval limite et réduit leur portée, tant dans leur fonctionnement que leur  impact.

Ce sont les agents sulfureux, polémistes et indétrônables - d’une classe aristocratique mafieuse  qui ne cesse de se rajeunir - qui en sont les auteurs.

Ils profitent du fait qu’ils appartiennent à la sphère du monopole de la proximité des pouvoirsune sphère capable d’ingérence dans les affaires de l’Etat. Ce sont eux qui sapent aussi ces véritables efforts. Ils détiennent vraisemblablement pour cela la clé des dédales obscurs de la gabegie. Ils sont en cela comme le disait si bien Huysmans de ses contemporains "Les moins scrupuleux, les moins obtus, jetaient toute vergogne à bas; ils trempaient dans des gabegies, vannaient la bourbe des affaires".

Aujourd’hui plus que jamais il est impérieux de mettre en branle l’arsenal juridique bien établi pour parer aux mauvaises pratiques qui gangrènent l’administration et minent les grandes institutions étatiques mettant pour ainsi dire en grand péril les acquis palpables réalisés tout au long des dernières années.

Or faut-il que cela commence au mieux par une dénonciation systématique et formelle des auteurs, grands comme petits, de la gabegie, tant à l’intérieur des structures étatiques qu’en dehors de celles-ci dans les sphères complices et incitatrices du secteur privé, de la nébuleuse politique polémiste et de la société civile insouciante et mercantile. En  fait, ces fauteurs de l’équilibre de "l’État de justice" ne doivent plus bénéficier de l’immunité et de l’impunité. Bien au contraire ! Ils doivent être écroués, traduits devant la justice, jugés et sanctionnés pour leurs gravissimes forfaits. Ils doivent ainsi servir de leçon à ceux, très nombreux, qui sont tentés par la chose publique dans tous ses états et qui n’attendent que leur tour advienne pour pouvoir.

Mais c’est, en toute évidence, à travers les tenants travestis d’une politique à l’allure hypocrite, sans structures saillantes, ni discours conséquents porteurs projets de société bien ficelés, que se développe inexorablement et se maintient la volonté destructrice de pérenniser une mentalité obsolète et des pratiques injustes. Une mentalité qui affecte lourdement une société civile avilie par la cupidité et une fausse noblesse déchue et passéiste.

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