L’intellectuel et écrivain mauritanien Ely Ould Sneiba compare FlAM au héro du conte Sabounyouma

Même si les héritiers de Bilad Chinguitt, cet ensemble arabe dont le rayonnement culturel avait révolutionné et chambardé les structures traditionnelles au Fouta, Toro et Djalon, dérouleraient, par faiblesse ou par complaisance, le tapis rouge aux Flam pour ériger le premier État peul de la sous-région, les voisins ouest-africains immédiats de la Mauritanie, les Wolofs au Sénégal, les Bambaras au Mali et les Malinkés en Guinée, seraient les premiers à plier ce tapis rouge de sang. Et l'histoire de Sabounyouma, sera une fois encore revisitée :

Voici l’histoire du cultivateur et du Guinnârou, (racontée aux aventurirs mauritaniens- N.D.L.R.)*.

Là-bas, il y a un vaste terrain tout près d’un grand fleuve, quelque part en Afrique. Un terrain recouvert par la brousse épaisse. Personne n’y vient jamais, parce que c’est là qu’habite Guinnârou le Roi des Guinnés (Élémentals ou Génies du coin).

Un jour, un homme appelé Sabounyouma, décide d’établir son champ là-bas. Il prit une hache, pénétra dans le taillis et commença à débroussailler. À peine la première branche entamée qu’une voix lui demande qui il est. L’homme se nomme et dit qu’il vient pour établir son champ sur le terrain.
- « Et qui t’a donné la permission ? » repris la voix du Roi des Génies.
- « Personne » dit l’homme.
- « C’est bon, je vais t’aider » dit le Guinnârou.
Aussitôt 150 Guinnés arrivent en riant ; en moins de 30 secondes tout fut débroussaillé.
- « Quel bon Génie j’ai trouvé là ! » dit Sabounyouma.
Mais quelque chose lui dit :
- « Ne parle pas trop vite. Attends un peu, un tout petit peu, et tu verras ce que Guinnârou fera ».

Le cultivateur s’installe donc, et à chaque fois qu’il commence a exécuter quelque chose sur le champ ne lui appartenant pas, le Guinnârou pose une question et envoie ses Guinnés qui démultiplient l’acte du cultivateur.

Un matin, Sabounyouma se sent fatigué, il envoie son fils en lui disant :
- « Quand tu entendras quelqu’un demander avec une grosse voix : « Qui est là ? » Tu répondras sans avoir peur : « C’est moi, fils de Sabounyouma ». Mais surtout ne t’avise pas de sucer les tiges de mil, sinon... gare à toi ! »
Le garçon une fois au champ chassa les oiseaux. Mais à peine avait-il déchargé sa fronde que :
- « Qui est là » demanda le Guinnârou, Roi des Guinnés.
- « C’est moi, fils de Sabounyouma. Je viens chasser les oiseaux dans le champ de mon père ».
- « C’est bon, je vais t’aider » dit Guinnârou.
Inutile de dire qu’avec l’armée de Guinnés les oiseaux furent tous tués.
Mais à midi, oubliant les recommandations de son père, le fils de Sabounyouma se glissa dans le champ, cueillit des tiges de mil, les éplucha, les cassa et les mâcha. Que c’était sucré et bon !

Mais à peine la première tige était-elle mâchée que...
Même questionnement du Guinnârou, et même aide de ses Guinnés : au soir, tout fut mangé ! Plus une tige de mil dans le champ.
L’enfant n’osa pas rentrer au village. À la nuit tombante, son père vient le chercher. En voyant toute la récolte détruite, il se mit en colère, empoigna son fils pour le frapper. Mais à peine avait-il donné la première gifle que...
- « Qui est là ? » demanda Guinnârou.
- « C’est moi, Sabounyouma ».
- « Et que fait-tu là ? » repris la grosse voix de Guinnârou, Roi des Guinnés.
- « Je frappe mon fils parce qu’il a laissé manger tout mon champ de mil », répondit Sabounyouma. Et il se mit à battre l’enfant.
- « C’est bon, je vais t’aider » dit Guinnârou.
Et Guinnârou d’appeler ses Guinnés pour donner un coup de main à Sabounyouma.
Qu’est ce qu’ils ont rigolés les Guinnés ! Quelle partie ! Avant minuit l’enfant tombait mort sous leurs coups.
- « Pauvre Sabounyouma, tu commences à connaître Guinnârou. Mais ce n’est pas tout ! Attends un peu, et tu verras ce que Guinnârou fera ».

Sabounyouma n’osa pas rentrer chez lui, aussi à l’aurore sa femme vient le chercher.
Aussitôt arrivé au champ elle voit son enfant mort, et se met à pleurer. Mais à peine a-t-elle versé une première larme que :
- « Qui est là ? » demande la grosse voix de Guinnârou.
- « C’est moi, la femme de Sabounyouma » répond-t-elle en pleurs.
- « Et que fais-tu-là ? » demanda Guinnârou.
- « Je pleure mon petit garçon qu’on a tué cette nuit » répond la femme de Sabounyouma en pleurant de plus bel.
- « C’est bon ! Je vais t’aider » dit Guinnârou.
Et dans l’Instant les Guinnés donne « un coup de main » à la femme de Sabounyouma.
Comme ils ont pleurés les Guinnés... Avant une heure, le femme fut emportée et noyée dans un fleuve de larmes.

Sabounyouma se retrouva seul au monde. Désespéré, il se laissa tomber sur le sol. Une fourmi se trouvait là. Elle le piqua. Il se gratta.
Mais à peine avait-il commencé à se gratter que :
- « Qui est là ? » demande la grosse voix de Guinnârou.
- « C’est moi, Sabounyouma ».
- « Que fais-tu là ? » reprit Guinnârou.
- « Je me gratte parce qu’une bête m’a piqué » répond Sabounyouma en claquant des dents.
- « Et qui t’en a donné la permission ? » gronda la grosse voix de Guinnârou.
- « Personne ! » cria l’homme. Et il se mit à courir.
- « Attends ! Attends ! Je vais te donner un coup de main ».
Et Guinnârou d’appeler ses Guinnés pour aider Sabounyouma à se gratter.
On lui gratta la peau, puis la chair ; on le gratta jusqu’à l’os.

(D’après un conte de l’Afrique Noire. On trouve une version de ce conte dans « Petits contes nègres pour les enfants des blancs », par Blaise Cendrars).

Par: Ely Ould Sneiba

 

Le titre initialement mis par l'auteur est : "La petite histoire de Sabounyouma racontée aux aventuriers de notre pays".

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