Justice indépendante et presse libre: un duo déstabilisant pour l’homme politique, mais pas pour le Président de la république!

Admirables, les hommes combattifs, les hommes tenaces. Pour eux, le succès est souvent au rendez-vous, surtout dans les pays démocratiques, où les talents  et le mérite trouvent les voies et moyens pour s’exprimer.

 Toutefois, quand l’avidité pour le pouvoir n’a pas de limites, l’homme politique risque de le payer très cher. C’est l’autre revers de la médaille en démocratie : l’indépendance de la Justice et le poids du « 4ème pouvoir » ont un sens à double tranchant. Autant, ils sont constructifs pour la société dans son ensemble, autant leur rencontre peut devenir terriblement  destructrice pour ceux qui se laissent guider dans leur action par l’adage : la fin justifie les moyens.   

Le cas de Nicolas Sarkozy ne cesse depuis quelques temps de le rappeler. L’ancien président français et homme fort de la droite croule aujourd’hui sous les ennuis judiciaires qui s’accumulent, et sous les révélations scandaleuses en cascade que dévoile la presse. Son parcours politique en prend des coups très graves. Certainement mortels.

 Lui-même l’a annoncé  d’une manière assez solennelle, mais quelque peu suspecte: « "La politique c'est fini, mais la France ça ne sera jamais fini", a –t-il déclaré lors de sa dernière sortie télévisée sur TF1. Pour  ceux qui croient aux capacités de résilience de l’homme battant qu’il est, ou pour ceux qui sont plus sceptiques, la dernière préposition de sa phrase pourrait être sujette à controverses, s’agissant de son avenir politique.

Seulement, comment est-ce que Sarkozy osera-t-il relever la tête avec des dossiers judiciaires aussi pesants que ceux étalés actuellement au grand jour (v. image ci-dessous) !  Difficile, en effet, d’imaginer des issues de secours pouvant le sortir du terrible gouffre, à la fois judiciaire et médiatique, dans lequel il s’enlise de plus en plus.

Cependant, le rôle actif et efficace joué par Silvio Berlusconi dans les dernières élections italiennes est là pour rappeler que l’espoir n’est pas forcement perdu définitivement pour l'ancien locataire de l'Elysée.

Seulement, l’Italie n’est pas la France et il Cavaliere n’est pas Nikolas, alias Paul Bismuth ; ce nom  d’un agent immobilier israélo tunisien que Sarkozy utilisait sur une ligne téléphonique secrète avec son avocat Thierry Herzog.

Mais ça, c’est une autre affaire sarkozienne dans les affaires sarkoziennes qui ont toute pour toile de fond: corruption. Un mot synonyme d'un carrefour déshonorant où se rencontrent l’ancien président français, l’ancien chef de gouvernement italien et les auteurs ou accusés de crimes financiers de façon générale.

Il en découle que le Cavaliere reste entaché à jamais. De nombreux indices indiquent que l’avenir de l’ancien président français sera probablement pire, bien que les accusations portées contre lui par les juges ne concernent pas la période où Sarkozy était aux affaires  publiques en tant que président de la République.  

Pourtant, en comparaison aux dossiers d’accusation en cours, et au vu des pouvoirs que confère le statut de Président de la République à celui qui l’occupe, il est permis de penser que Sarkozy aurait pu commettre des actes de corruption, de trafic d’influence, de malversation… durant son exercice du pouvoir à la tête de l’Etat français. Mais indépendamment de la présomption d’innocence qui met des limites à cette hypothèse, et en dehors du fait qu’elle soit fondée ou non, le Président Sarkozy est intouchable, juridiquement parlant. Car en tant que chef de l’Etat, il n’est pas justiciable. Ainsi en décidé la Constitution de la 5ème République, dont l’article 68 stipule :

« Le président de la République n'est responsable des actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute trahison. Il ne peut être mis en accusation que par les deux assemblées statuant par un vote identique au scrutin public et à la majorité absolue des membres les composant ; il est jugé par la Haute Cour de justice. »

Voilà comment le modèle constitutionnel français, souvent cité en exemple, fait du Président un citoyen au dessus des autres : il n’a pas de compte à rendre à la Justice sauf en cas de haute trahison; c'est à dire presque jamais. Et dans ce cas, il est également au dessus des autres : seule la Cour de justice est compétente pour le juger.

Comme quoi, l’égalité des citoyens devant la Justice n’est pas une règle absolue, contrairement à ce qu'on chante un peu partout. Le système constitutionnel français et les pays qui le prennent comme modèle passent outre ce principe. Et ils le font démocratiquement en instituant un système démocratique qui fait du Président un homme non justiciable ! Quel paradoxe !  

 El Boukhary Mohamed Mouemel

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