Je suis né à Nouakchott. Là est ma vie. L’histoire de ma famille (mon père y vivait en 1960, avant d'amener la famille en 1961) et la mienne se confond avec celle de cette ville née par miracle.
Nouakchott est ma première référence, celle qui se retrouve partout pour chacun des miens, y compris ceux qui sont nés au Bled.
Il m’est coutume de répondre à ceux qui me posent cette question que je trouve incongrue, mais qui, hélas, est si coutumière par ici : « De qui es-tu ? » et qui signifie en langue vernaculaire : De quelle tribu es-tu ?
Ma réponse ne se fait pas attendre : « Je suis de Nouakchott ». Il va sans dire que je laisse sur leur faim ces curieux du référentiel anachronique et passéiste.
Là, j’ai aimé, vécu, grandi, étudié et j’y vis présentement. Même l’intérieur du pays est exil pour le Nouakchottois invétéré que je suis. Car un pacte tacite me lie à cette ville et je lui demeurerai fidèle.
À ceux qui te sont infidèles, Ô Nouakchott, je dis : "Honni soit qui mal en pense!"
Je suis horripilé par ceux qui ânonnent sans fin la longue litanie des crimes commis çà et là et t’incriminent à la fin, te faisant porter la responsabilité des méfaits des hommes, eux qui ignorent que tu souffres de la souffrance de chaque être que tu reçois en ton sein, toi qui te portes garante jusqu’à ce qu’il sorte de ton enceinte sain et sauf, avec l’espoir d’un retour que tu voudrais proche !
Ils n’entendent pas les battements de ton cœur, ne ressentent point la caresse de ton souffle. Leur cœur n’est pas à Nouakchott, ni leur esprit. Âmes perdues, ils ne sont de nulle part, les pauvres.
Je suis écœuré par tant d’inconstance, d’improbité que je suis sensible à tes larmes, à tes sanglots.
Pourtant, tu es le théâtre de leur vie, le lieu de leurs joies, de leurs peines.
De ton odonymie, de ta toponymie, vouées à tous les diables, de ta poétique spatiale hermétique accessible aux seuls initiés, je ne dirais mot.
Loin de t’en vouloir, comme il m’arrive par moments, cette fois, je prends ta défense.
Et je me fais ton fervent défenseur, ta voix, ton conteur, ton poète.
Ah, Nouakchott de mon enfance!
Par: Med Yahya Abdel Wedoud
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